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Quatre candidats peuvent espérer accéder au second tour de l'élection présidentielle, à en croire les sondages. Récit d'une compétition marquée par plusieurs événements inattendus.
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Fillon dégomme Juppé et Sarkozy

Ils ne l'ont pas vu venir dans la bataille de la primaire de la droite, à l'automne 2016. Alain Juppé planait en haut des sondages depuis plusieurs mois. Nicolas Sarkozy suscitait encore de l'enthousiasme auprès d'un carré de fidèles. François Fillon a labouré la France, en quête du soutien des élus et des militants Les Républicains. Il s'est bâti une image de libéral (sur les thématiques économiques et sociales) et de conservateur (dans le domaine sociétal). Le 20 novembre, en virant en tête du premier tour de la primaire avec 44,1 % des voix, l'ex-Premier ministre fait coup double. Il laisse peu d'espoirs à Alain Juppé (28,6 % des suffrages) et élimine Nicolas Sarkozy (20,7 %). Une semaine plus tard, avec 66,5 % des voix, François Fillon remporte aisément la victoire face au maire de Bordeaux.

Hollande contraint de renoncer

Le chef de l'Etat a hésité. Le 1er décembre, dans une annexe de l'Elysée, François Hollande fait enfin part de sa décision. Ton grave, voix parfois tremblante, costume et cravate noirs, il vante son bilan, prolonge un peu le suspense pour mieux le briser : il n'est pas ''candidat à l'élection présidentielle''. Une première historique : à l'exception de Georges Pompidou, mort pendant son mandat, tous les présidents de la Ve République ont tenté de se faire réélire. François Hollande laisse le champ libre à Emmanuel Macron (En marche !), son ancien protégé qui a annoncé sa candidature à la magistrature suprême le 16 novembre, ainsi qu'à Manuel Valls. Après l'avoir poussé à renoncer, le Premier ministre démissionne et se présente à la primaire du Parti socialiste.

Le frondeur Hamon chargé de porter les couleurs d'un PS déchiré

Les Français le connaissaient moins qu'Arnaud Montebourg et que Manuel Valls. Mais pendant la campagne de la primaire, Benoît Hamon, l'un des chefs de file des frondeurs, ces députés opposés à la politique sociale-libérale de François Hollande, a creusé son sillon et émis une proposition originale : le revenu universel. Au premier tour, le 22 janvier, l'ancien ministre de l'Education nationale devance largement l'ex-chef du gouvernement et son rival à la gauche du Parti socialiste. Lors du débat de l'entre-deux-tours, Benoît Hamon détaille son projet face à un Manuel Valls en retrait. Finalement, il gagne la primaire avec 58,69 % des voix. Le soir du second tour, le 29 janvier, au siège du parti, la poignée de main entre les deux adversaires manque d'entrain. Le PS est déchiré.

Fillon, englué dans les affaires, maintient sa candidature

''Qui imagine un seul instant le général de Gaulle mis en examen ?'' François Fillon ne devinait pas que sa pique contre Nicolas Sarkozy, lancée le 28 août 2016, se retournerait contre lui. Le 1er mars, il confirme qu'il est convoqué par la justice en vue d'une probable mise en examen, mais maintient sa candidature. François Fillon est dans la tourmente depuis les premières révélations du Canard Enchaîné sur des emplois fictifs supposés, fin janvier. Il a affirmé qu'il renonçait à sa candidature en cas de mise en examen. Pourtant, devant l'incapacité des Républicains à s'accorder sur un autre candidat, fort de sa victoire à la primaire, laissant entendre qu'il est visé par un complot, il rassemble plusieurs milliers de ses partisans le 5 mars au Trocadéro, à Paris. C'est une démonstration de force. Alain Juppé doit admettre qu'il ne peut être candidat à sa place.

Macron profite des faiblesses de ses concurrents Hamon et Fillon

Et le troisième homme devient le favori. Le centriste François Bayrou, trois fois candidat à la présidentielle, apporte le 22 février son soutien à Emmanuel Macron. Un atout pour l'homme qui juge dépassé le clivage entre la droite et la gauche. Le candidat d'En marche ! profite aussi des faiblesses de ses adversaires. Après sa victoire à la primaire, Benoît Hamon perd du temps en négociant avec Yannick Jadot et Jean-Luc Mélenchon. Le candidat d'Europe Ecologie-Les Verts se retire de la course, mais pas celui de La France insoumise. Emmanuel Macron bénéficie également des problèmes judiciaires de François Fillon, qui chute dans les sondages en février. Certains électeurs des Républicains, outrés par les affaires, comptent voter pour l'ex-ministre de l'Economie.

La fin de la campagne rebat les cartes

Jean-Luc Mélenchon est le vainqueur incontesté des deux débats entre les candidats, le 20 mars avec les quatre autres prétendants en tête des sondages, le 4 avril avec ses dix concurrents. Son talent oratoire et ses propositions résolument à gauche lui permettent de prendre l'ascendant sur Benoît Hamon.

La campagne de Marine Le Pen, elle, patine. Lors des deux émissions, la présidente du Front national, autre personnalité anti-système, peine à avancer ses propositions. Elle est ébranlée par la charge de Philippe Poutou (Nouveau parti anticapitaliste) qui, en référence aux affaires judiciaires touchant le FN, déclare : ''Quand nous, on est convoqué par la police, nous ouvriers (...), on n'a pas d'immunité ouvrière, désolé, on y va.''

Ces derniers jours, l'entourage d'Emmanuel Macron a perdu un peu de son assurance, craignant qu'il soit devancé au premier tour par Jean-Luc Mélenchon ou François Fillon, lequel a regagné des points dans les sondages. Déjà, les états-majors ont les élections législatives (11 et 18 juin) en ligne de mire. Le futur président ne pourra mettre en œuvre son programme que s'il dispose d'une majorité à l'Assemblée nationale.