Réforme des retraites : le gouvernement va-t-il encore vous sacrifier au profit d’importantes économies ? Istock
Depuis des mois, déjà, l'exécutif tergiverse sur le sort qui attend les Françaises et les Français, une fois prise la retraite. Pourtant, l'un des débats lancés par le gouvernement d'Emmanuel Macron viserait potentiellement à faire des profits sur leurs dos, assure un important institut d'étude…
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Réforme des retraites : ce "faux débat" sur l'équilibre financier du régime

"On ne fera pas l'économie de l'âge et c'est mentir par omission aux Français que de dire le contraire", s'agaçait Geoffroy Roux de Bézieux sur le plateau de France Inter, en août 2019. Aux yeux du président du Mouvements des entreprises de France (MEDEF), c'est là la plus importante des dimensions de la réforme à laquelle travaille le gouvernement : la question financière. 

Le sujet, c'est un fait, fait largement débat. Plusieurs ministres se sont déjà exprimés en faveur d'un report de l'âge légal de départ à la retraite à taux plein, comme Gérald Darmanin ou Agnès Buzyn. Jean-Paul Delevoye, qui cumule aujourd'hui sa retraite de maire et ses indemnités de ministre déléguée à la ministre de la Santé et des solidarités, avait opté pour un âge pivot à 64 ans. Quiconque partait avant l'âge écoperait donc d'une décote.

Pourtant, d'après l'institut d'études privé Xerfi, c'est là un faux débat, indique Capital. "Au fil des réformes", explique Olivier Passet, directeur en recherches économiques pour l'organisme, "le système a été paramétré de sorte à assurer sa viabilité financière à long terme. Ceux qui font remarquer que ce n'est pas l'enjeu prioritaire aujourd'hui ont raison", poursuit-il.

"Les dernières projections, construites sur des hypothèses de croissances variant de 1% à 1,8% montrent que la part des dépenses de retraite va au pire se stabiliser, au mieux décroitre de 2 points de PIB", ajoute l'expert, pour qui "la viabilité financière du système est à la portée de réformes relativement douces".

Ce qui n'exclut pas, dans l'absolu, de poser la question. Pour l'économiste, celle-ci ne devrait d'ailleurs pas sortir du "périmètre de la réforme". "Il s'agit bien d'un enjeu structurel qui engage l'équité du système". Par ailleurs, si "il n'y a pas péril en la demeure", tous les scénarios évoquent un déséquilibre d'un demi-point de PIB d'ici à 2025. Jusqu'à 2035, il devrait être compris entre 0,3 et un point de PIB.

Réforme des retraites : le gouvernement réalise-t-il des économies sur le dos des retraités ?

Certes, estime Olivier Passet, la question est légitime. Pour autant, elle pourrait s'avérer préjudiciable pour le gouvernement, explique-t-il. "Mettre maintenant le focus sur l'âge de la retraite ou la durée de cotisation donne l'impression que la réforme, derrière sa simplicité et son uniformité revendiquées, est un écran de fumée, destinée à faire des économies sur le dos des futurs retraités", pointe-t-il du doigt.

Depuis que le gouvernement a commencé à tergiverser sur l'âge de départ à la retraite à taux plein, "le message s'est brouillé, pour prendre les allures d'une tartufferie", souligne-t-il encore sur le site de Xerfi Canal. Un glissement qu'il ne juge "pas anodin" : il pourrait pénaliser les futurs retraités les moins qualifiés, qui ont commencé à travailler plus tôt que celles et ceux ayant eu la possibilité de mener des études plus longues. D'autant plus concernant quand on sait que "la solidité financière à long terme du système de répartition se baâtit sur une paupérisation relative des retraités", comme l'explique Olivier Passet.

"La portée symbolique de la réforme de l'âge est susceptible de tout faire capoter", alerte-t-il, en dépit de combien le gouvernement a souhaité "bétonner la situation des plus précaires". "Surtout si l'on ajoute à cela le bataillon des fonctionnaires (notamment enseignants) qui pourraient perdre dans le nouveau système", ne manque-t-il pas de préciser.