Scandale des Ehpad : "8 mois après, la situation n’a pas changé"Istock
Maltraitance, négligence... Le scandale des Ehpad a secoué la France au début de l'année. Huit mois après, les associations sur le terrain recueillent toujours des témoignages alarmants et attendent de vraies avancées pour les résidents.
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Des révélations qui ont secoué le pays. Il y a huit mois, fin janvier 2022, les Français découvraient avec effroi que des résidents d’Ehpad étaient maltraités dans des établissements du groupe Orpea. Le livre Les Fossoyeurs, publié par le journaliste Victor Castanet, dévoilait alors au grand jour ce qui se faisait à l’abri des regards, une fois les portes fermées. Très vite, les témoignages se sont multipliés et les familles de résidents ont commencé à s’inquiéter. Dans la foulée, le gouvernement annonçait un vaste plan de contrôles des différents Ehpad du territoire, sur deux ans.

Ehpad : un scandale qui n'a eu aucun effet ?

Ces cas de maltraitances, dont Planet se faisait aussi l’écho, ont profondément choqué le pays. Huit mois après, la tempête passée, où en est-on ? Presque nulle part, à en croire plusieurs associations de défense des résidents ou de leur famille. Dans une lettre que nous avons pu nous procurer, associations et collectifs lancent un "appel urgent en faveur des résidents en Ehpad et des personnes âgées accompagnées à domicile" et demandent au gouvernement de les aider à construire "un véritable projet de vie" pour nos aînés.

Interrogé par Planet, Patrick Collardot – fondateur de l’association TouchePasMesVieux – affirme que "pas grand-chose n’a changé" depuis les révélations de l’hiver dernier. "Les remontées sur le terrain montrent que la situation est toujours la même, il n’y a pas de nouvelle loi et c’est le statu quo", précise-t-il. Son association, comme d’autres, continue à recevoir des témoignages de familles dont les proches sont victimes de maltraitances, parfois par négligence ou manque de soins. Est-ce la faute du gouvernement ? "Le ministère de la Santé prend le problème à bras le corps", affirme Patrick Collardot, ajoutant qu’une cellule y a été mise en place pour recueillir les témoignages de ces familles. Problème, il en recevrait beaucoup moins que ce qu’il se passe en réalité…

Ehpad : ce que demandent les proches des résidents

Des témoignages de maltraitance arrivent jusqu’au ministère, qui incite associations et collectifs à les faire remonter, même de manière anonyme, mais ce n'est que la partie émergée de l'iceberg. Si c’est une bonne chose que les pouvoirs publics aient conscience de ce qu’il se passe dans certains établissements, pour Patrick Collardot c’est loin d’être suffisant. Son association, comme d’autres, demande avant tout à ce que la loi du grand âge soit effective, "donnant enfin les moyens nécessaires à un accompagnement digne pour toutes les personnes fragilisées par l’âge, à domicile comme en établissement et permettant ainsi que les Ehpads deviennent un véritable lieu de vie normale et d’accompagnement".

S’il sait que ce texte va demander un travail titanesque et sur le temps long, le fondateur de TouchePasMesVieux milite aussi pour la mise en place de petites améliorations, qui faciliteraient la vie des résidents au quotidien. C’est notamment le cas du Conseil de vie sociale, qui permet d’ouvrir le dialogue entre la direction, les familles de résidents et le personnel. D’autres concernent directement le quotidien des personnes âgées, comme la qualité des repas ou celle des animations. Malgré les dernières révélations, les associations savent bien que le temps va encore être long…

Ehpad : ne pas couper le lien entre les résidents et leurs proches

Plus écoutées qu’avant le scandale dans certains établissements, les associations de défense des résidents et de leur famille savent que rien n’est encore joué. TouchePasMesVieux constate que des petites choses bougent déjà du côté du gouvernement, mais que "la seule façon viable et pérenne de changer les choses, c’est de travailler au niveau des textes". "Tant que les normes ne changent pas, les avancées seront provisoires", ajoute Patrick Collardot auprès de Planet. Cela signifie faire modifier les textes réglementaires, ce qui sera long.

Parmi les avancées demandées par son association se trouve la modification du "pouvoir de police" des établissements. Alors qu’ils ont le droit de décider de la fermeture totale de l’établissement pour protéger les résidents, Patrick Collardot demande à ce que des directeurs ne l’utilisent pas pour fermer les portes aux familles le week-end ou certains matins. "Je ne vois pas quel est le côté positif pour les résidents de ne pas voir leurs proches. Quand ils ne les voient pas ils descendent la pente, ils ne la remontent pas…", insiste-t-il auprès de Planet, avant de conclure : "Il faut faire changer une situation qui n'est pas acceptable".